The Man Next Door, Emerson Hough [beach read book .txt] 📗
- Author: Emerson Hough
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Les maisons de campagne sont charmantes, couvertes d'oliviers, de mûriers, d'arbres fruitiers de toutes les espèces et surtout de citronniers, de limonniers, de cédrats et d'orangers; çà et là, sont des jardins et des bosquets habités par des Français, des Anglais et des Allemands. Le Grand Duc Michel de Russie hivernait encore à Nice quand nous y étions. On voit aussi de jolies femmes se promener le long du Paglion, les unes à pied et les autres à ânes, à l'anglaise; les maisons sont fort élégantes, et toutes peintes en vert, jaune, bleu, etc.
Le Théâtre est assez beau ainsi que les Bains. La vie est chère. On y trouve de bons restaurants et de bons hôtels.
La pensée n'a point un libre cours à Nice; elle est limitée dans un cercle étroit de connaissances; l'Archevêque est chargé de la police de la librairie, et d'exercer une espèce d'inquisition sur tout ce qui tient au domaine intellectuel: l'ignorance étant une des causes d'immoralité, les moeurs sont peu réglées, et la religion n'est pas pratiquée avec sincérité; on s'en sert comme d'un auxiliaire pour arriver à l'accomplissement de ses désirs.
Le Consul de France s'est intéressé à notre position; il a eu la complaisance de se charger de toutes les démarches pour le visa de notre passeport.
Nous partons de Nice pour Gênes, par le courrier, et nous traversons Menton; la route très-variée et montueuse de la Corniche, qu'on appelle aussi la rivière de Ponen, est féconde en grandes émotions. Nous voici sur la principauté de Monaco: cette cité se compose de deux ou trois rues sur des roches à pic; mille misérables y meurent de faim: un château délabré en est l'ornement. Un bataillon de troupe, compose l'armée de cette puissance. On y voit sur quelques arpents de terre, de beaux orangers, des oliviers, des mûriers épars en petit nombre jusque sur les roches. La misère y est extrême. Le Prince est un piccolo potentat qui exprime tous les sucs métalliques de ses sujets; il a pourtant cinq millions de revenus! Ses douaniers et ses carabiniers ne jouissent du bienfait d'aucune solde: ainsi que les oiseaux de proie, ils vivent de rapine, et regardent les voyageurs comme leur butin; ils les étrillent et les rançonnent le plus qu'ils peuvent. Son premier magistrat jouit seulement du petit traitement de 600 francs. Nos compagnons de voyage étaient un sénateur de Nice et un négociant de Gênes. Le sénateur nous dit que les Italiens ayant la monomanie du poignard, les gouvernements, afin d'empêcher les assassinats, avaient fait des lois très-sévères et punissaient des galères ceux qu'on trouvait avoir des armes secrètes comme pistolets de poche, cannes à épées, etc. Ce grave aréopagiste, malgré l'austérité de moeurs qu'impose la toge, ne paraissait point insensible, ainsi que le génois, à la courtoisie, et si on eût donné pied, ils auraient volontiers cultivé le Sigisbéat en vogue à Gênes. Si les voitures publiques ont quelques désagréments qui, quand on veut se tenir, n'ont jamais aucun fâcheux résultat, elles ont l'avantage d'apprendre à connaître le pays. Dans sa voiture, que voit-on? qu'entend-on? On voyage comme si on ne voyageait pas. On revient chez soi après bien des fatigues, aussi vide et aussi dénué de connaissances qu'en quittant ses foyers. La route devient des plus montueuses et des plus effrayantes; dans beaucoup d'endroits, une voiture peut seule passer; des précipices et la mer sont à deux cents pieds; la roue de la voiture, assez fragile, n'en étant éloignée que de quelques pouces, n'a point la garantie des parapets, la route est onduleuse et suit les inégalités de la mer: ce sont des montées et des descentes continuelles; sur votre tête, des roches affreuses qui vous menacent et que les grandes pluies détachent souvent. Dans les orages et dans le bas des montagnes, s'improvisent d'horribles torrents et de petites rivières que la prudence ne permet pas toujours de passer; il faut alors attendre l'écoulement de ces eaux, qui ne tardent pas beaucoup à se retirer. Les propriétés sont aussi chères qu'en France. Pour six francs par jour, on peut nourrir deux chevaux.
L'épine-vinette et le sorbier lancent leurs grappes de corail. Les plus faibles étendues de terrains inclinés sur l'escarpement des montagnes, sont aussi bien cultivées qu'un jardin; dans tous les bouleversements de la nature, au milieu de ces rochers détachés des montagnes et retenus par des arbres élevés dans leurs intervalles, on voit des signes de la patiente et réparatrice industrie de l'homme.
Dans ces passages étroits, on rencontre de jeunes voyageurs ayant une blouse en toile grise, de gros souliers, un havre-sac renfermant un bagage où ils ont rarement recours, si on en juge par leur extérieur.
Nous changeons de chevaux, après avoir fait une lieue; le postillon s'arrête, dit au courrier qu'il venait de laisser tomber son manteau sur la route, il nous fait attendre plus d'une heure; il avait été le chercher chez lui. En France, tolère-t-on de pareils délais; les entreprises générales des postes souffriraient-elles de pareilles infractions. Un conducteur de chevaux ne serait-il pas immédiatement expulsé. Nous devons cependant le dire, à la louange des Italiens, nulle part nous n'avons trouvé de postillons et voiturins pris de vin; ils ne s'enivrent point de rosette, comme à Marmande; presque toujours un postillon français rit, se dépite, chante ou jure tout le temps qu'il est en route; si une montagne ou quelques mauvais chemins l'oblige d'aller doucement, il fait claquer son fouet par dessus sa tête, pendant un quart d'heure, sans rime ni raison; tout ce bruit, ce mouvement, viennent de cette aversion pour le repos.
Un postillon italien, au contraire, mène quatre chevaux avec toute la tranquillité possible; il ne chante, ni ne rit, ni ne s'impatiente; il fume seulement, et, quand il approche d'un défilé, il sonne de la trompette, pour empêcher les voitures d'entrer par l'autre bout, avant qu'il ait passé. Si vous lui dites d'aller un peu plus vite, il se retourne, vous regarde en face, ôte sa pipe de sa bouche, et continue à suivre exactement le même pas.
Au milieu de la nuit, je ne dormais pas, occupé, dans un passage si difficile, à veiller aux jours précieux qui m'étaient confiés, lorsque les roues, à quelques pouces des abîmes, trouvent de grosses pierres pour obstacles; nous allions verser, et descendre dans la mer, à quelques centaines de pieds. Je réveille les voyageurs, nous mettons à la hâte pied à terre, et nous laissons la voiture, avec notre Phaëton, vide de nos personnes, franchir ces périls. En attendant, quoique sur le minuit, guidé par notre sénateur et le génois, nous cherchons à visiter un Moulin à eau; les meuniers se livraient à quelques réparations; ils sont effrayés d'entendre des visiteurs nocturnes, ils croient aux farfadets et aux brigands; nous revenons à la charge, nous les lassons, ils nous ouvrent; ils aiguisaient des meules à la lueur lugubre d'une torche. Ayant eu un moment de conversation, nous remontâmes dans la voiture, qui avait déjà franchi la descente dangereuse.
À Final, nous sommes satisfaits de l'hôtel; tout y est meublé à l'antique; ce serait une bonne fortune pour les amateurs, puisque le rococo reparaît triomphant sur cette scène du monde. Nous fûmes fort bien traités, on nous fit manger d'excellents choux rouges et des fruits délicieux du Pomi Carli, fondant comme la beurrée d'Arembert. Le domestique de table ne trouvant pas notre appétit proportionné à la bonté de la cuisine, croyait, par scrupule de conscience, devoir nous exciter à faire honneur au dîner; il nous disait avec candeur: Mangez autant que vous pourrez, que vous mangiez beaucoup ou peu, les prix de table d'hôte sont ici fixés.
Nous n'avons point encore vu d'aussi belles églises qu'à Final; avant d'y arriver, nous avons eu à franchir la haute montagne de la Scatera; les voitures montent au moins douze cents pieds pour les descendre ensuite; des hommes sont postés de distance en distance, afin de prévenir les conducteurs de s'arrêter dans quelques endroits plus spacieux; car deux voitures ne peuvent passer de front; on descend par dix spirales parfaitement ménagées; mais on est bien dédommagé des périls et des craintes par la vue magnifique dont on jouit sur ces hauteurs, qui forment une barrière hardie et soudaine; ce sont de véritables limites naturelles.
L'aspect de ces montagnes est superbe, et produit dans l'esprit des sensations fort agréables, surtout lorsque la première fois Gênes et la Méditerranée s'offrent aux regards. En descendant une de ces collines couvertes de myrtes, d'oliviers, de grenadiers qui contrastent avec la stérilité du sommet des rochers, on oublie tout ce qu'on a enduré de pénible. Nous continuons la route; c'est un beau bois d'oliviers que nous traversons; plus loin, un jardin anglais composé de palmiers, d'orangers, de citronniers et de mûriers; puis nous franchissons deux montagnes, creusées en forme de voûtes; il est impossible de voir des sites plus riants; la nature était parée comme un printemps, la mer majestueuse s'élevait par fois jusqu'aux nues, venait mugir et expirer contre les rochers escarpés; des vaisseaux, des embarcations, des bateaux à vapeur sillonnant les ondes, tout cela est une variété curieuse. Nous commençons à voir des buffles imposants dans leurs allures.
Nous arrivons à Savone, où le Saint-Père Pie VI, sous l'empire, a été détenu au Palais de l'Archevêché. Les femmes, déjà comme à Gênes, ont le voile ou le schal sur la tête. Les ordres religieux continuent de se multiplier. Napoléon, dans le court trajet de sa gloire, a rempli tous ces états de travaux immenses; c'est lui qui a ordonné la route de la Corniche, si hérissée de difficultés: il s'est fâché contre l'ingénieur en chef d'avoir organisé cette route sur les points saillants des montagnes, tandis qu'elle pouvait être pratiquée au bas des rochers. On a regardé cet ingénieur comme vendu aux Génois, qui voulaient par suite conserver leurs remparts en cas d'invasion et d'hostilités.
CHAPITRE VI.De Gênes, Livourne, Pise à Florence.
Nous arrivons à Gênes, reine de la mer de Ligurie, vers onze heures du soir, et nous avions fait quarante-cinq lieues depuis Nice. Peu versés dans la langue génoise, nous eûmes un moment de difficulté pour nous rendre à la Croix de Malte. Notre facchino, c'est le nom des portefaix en Italie, nous faisant passer par des rues très étroites, je crus qu'il ne m'avait pas compris, et qu'au lieu de nous conduire à un hôtel honnête, il nous dirigeait dans une habitation moins convenable; les rues devenant si étroites qu'on avait peine à circuler, je me tuais de lui crier en italien, qu'il se trompait, et que nous allions mal. Dans presque tous les pays chauds, les rues sont très-resserrées pour conserver de la fraîcheur; autrefois même, dans le temps des sièges, cela rendait plus faciles les moyens de défense; enfin, après avoir bien circulé dans ces ruelles, nous sommes à la Croix de Malte; c'est un véritable palais: le vestibule en mosaïque et des jets d'eau y répandent la fraîcheur; l'escalier en marbre est fort glissant; c'était pour moi une difficulté de monter et descendre, je craignais vaciller et me casser la tête; notre chambre à coucher était magnifique; nous n'avons vu nulle part plus d'élégance; l'argenterie abonde et prend mille formes gracieuses. Beaucoup d'Anglais, et où n'en trouve-t-on pas! habitaient notre hôtel. Sitôt que nous sûmes les bureaux ouverts, notre première occupation fut d'aller chercher, à poste restante, c'est l'usage en Italie, nos lettres de France. Nous en trouvâmes plusieurs de nos parents, une de M. Perrin, l'un des estimables avocats de Nantes, mon affectionné du premier âge, dont l'amitié a toujours été sans nuages, par l'excellence de son caractère, sur lequel nous pouvions compter comme sur nous-mêmes, ainsi que sur sa charmante compagne. Cet ami nous donnait des nouvelles de notre cher enfant. Les lettres étaient très-favorables; la santé de notre rejeton allait à merveille. Nous remîmes immédiatement, à M. le Colonel Giraldes, Consul-Général de Portugal, des lettres que M. le Docteur Godillon, son beau-frère, nous avait chargés de lui porter; M. le Consul, avec de pareilles recommandations, nous accueillit fort bien, ainsi que ses dames, et fit tout ce qu'il put pour rendre notre voyage agréable. À Gênes, les femmes du peuple sortent avec un voile de toile peinte ou de mousseline gracieusement jeté en arrière de la tête, qu'on appelle Mezzaro; elles peuvent se promener seules avec ce voile, sans que personne le trouve mauvais: en général, les femmes sont mal mises, elles confondent la richesse et les ornements; elles se fardent avec du blanc, et sont couvertes, même les jours ouvriers, de bijoux d'or et d'argent; le dimanche, elles y ajoutent quantité de perles fines et de coraux: les dames, plus aisées,
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