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Book online «Portraits Littéraires, Tome Iii Volume 1, C.-A. Sainte-Beuve [ebook reader for surface pro .txt] 📗». Author C.-A. Sainte-Beuve



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D'épreuves_, Comment On Vivait À

Liancourt, En Cette Sorte De Paradis Terrestre, Et Quelles Occupations

Rurales, Bienfaisantes Ou Littéraires Y Variaient Les Heures: «Après De

Laborieuses Recherches, Écrit M. Lacretelle, Après Avoir Dépouillé Une

Vaste Et Touchante Correspondance, Il (Le Duc De Liancourt) Rédigeait

Ses Mémoires[308], Les Soumettait À Ma Critique, À Ma Révision.

J'avoue Que Ce Fut D'abord Pour Moi Une Torture Que De Chercher Des

Embellissements À Un Travail Tout Uni, Mais Parfaitement Conforme Au

Sujet. Mon Style Me Paraissait À Moi-Même Trop Ambitieux Et Trop Fleuri.

Je Voyais Bien Que L'auteur En Portait Tout Bas Le Même Jugement. Il Me

Dit Un Jour: _Ma Prose Fait Tache Dans La Vôtre_. Ce Compliment Plus Ou

Moins Sincère Fut Pour Moi Un Avertissement D'user Avec Réserve De Mon

Métier De Polisseur. Plus J'y Mis De Discrétion Et D'économie, Et Mieux

Nous Nous Entendîmes.» Nous Ne Nous Sommes Pas Même Cru En Droit De Nous

Permettre Ce Soin Si Sobre; À Part Un Ou Deux Endroits Où La Copie Était

Évidemment Fautive, Nous En Avons Respecté Tout Le Négligé. Cette Copie

Provient De Celle Que Possède La Bibliothèque De L'arsenal, Et Qui,

Perdue Dans La Masse Des Papiers De M. De Paulmy, A Été Récemment

Retrouvée Par M. Varin.

 

15 Février 1846.

 

[Note 308: Ils Ont, Par Malheur, Été Détruits.]

 

 

 

 

 

Mémoires Sur La Mort De Louis Xv

 

La Maladie D'un Roi, D'un Roi Qui A Une Maîtresse, Et Une C... Pour

Maîtresse, D'un Roi Dont Les Ministres Et Les Courtisans N'existent

Que Par Cette Maîtresse, Dont Les Enfants Sont Opposés D'intérêts Et

D'inclination À Cette Maîtresse, Est Une Trop Grande Époque Pour Un

Homme Qui Vit Et Qui Est Destiné À Vivre À La Cour, Pour Ne Pas Mériter

Volume 1 Title 1 (Portraits Littéraires, Tome 3) pg 270

Toutes Ses Observations. C'est D'ailleurs Un Événement À Peu Près Unique

Dans La Vie, Et Qui Sert Plus Qu'aucun Autre À La Connaissance Parfaite

De Cette Classe D'hommes Qu'on Appelle Courtisans. Destiné, Comme Je

L'étais, À Voir Un Jour Le Roi Malade, Je M'étais Toujours Proposé De

Suivre Avec La Plus Grande Attention Toute La Scène De Sa Maladie, Et

Tous Les Différents Mouvements Qu'elle Devait Produire. L'idée Que

J'avais Avec Toute La Cour De L'effet Que Ferait Sur Le Roi Le Second

Accès De Fièvre, Rendait À Ma Curiosité Ce Moment Intéressant, Il Me

L'était D'ailleurs Encore Plus Par Le Renvoi, Que Je Regardais Comme

Certain, De Sa Maîtresse, Et Par La Chute D'un Ministre, Et D'un

Ministre Odieux, Qui Devait Être La Suite Nécessaire Du Renvoi De

Cette Maîtresse. La Santé Du Roi, Le Soin Qu'il En Avait, Sa Vigueur,

Paraissaient Devoir Éloigner Cet Événement, Quand Tout À Coup Il Arriva

Au Moment Où On S'y Attendait Le Moins.

 

Le Mercredi 27 Avril[309] Au Matin, Le Roi, Étant À Trianon De La Veille,

Se Sentit Incommodé De Douleurs De Tête, De Frissons Et De Courbature.

La Crainte Qu'il Avait De Se Constituer Malade, Ou L'espérance Du Bien

Que Pourrait Lui Faire L'exercice, L'engagea À Ne Rien Changer À L'ordre

Qu'il Avait Donné La Veille. Il Partit En Voiture Pour La Chasse; Mais,

Se Sentant Plus Incommodé, Il Ne Monta Pas À Cheval, Resta En Carrosse,

Fit Chasser, Se Plaignit Un Peu De Son Mal, Et Revint À Trianon Vers Les

Cinq Heures Et Demie, S'enferma Chez Mme Dubarry, Où Il Prit Plusieurs

Lavements. Il N'en Fut Guère Soulagé, Et Quoiqu'il Ne Mangeât Rien À

Souper, Et Qu'il Se Couchât De Fort Bonne Heure, Il Fut Plus Tourmenté

Pendant La Nuit Des Douleurs Qu'il Avait Ressenties Pendant Le Jour, Et

Auxquelles Se Joignirent Des Maux De Reins. Lemonnier[310] Fut Éveillé

Pendant La Nuit; Il Trouva De La Fièvre. L'inquiétude Et La Peur Prirent

Au Roi; Il Fit Éveiller Mme Dubarry. Cependant Cette Inquiétude Du Roi

Ne Paraissait Encore Point Fondée, Et Lemonnier, Qui Connaissait Sa

Disposition Naturelle À S'effrayer De Rien, Regardait Cette Inquiétude

Plutôt Comme Un Effet Ordinaire D'une Telle Disposition Que Comme Le

Présage D'une Maladie. Il Voyait Avec Les Mêmes Yeux Les Douleurs Dont

Le Roi Se Plaignait, Et En Rabattait Dans Son Esprit Les Trois Quarts,

Toujours Par Le Même Calcul. Voilà Ce Qui Arrive Toujours Aux Gens

Douillets; Ils Sont Comme Les Menteurs: À Force D'avoir Abusé De La

Crédulité Des Autres, Ils Perdent Le Droit D'être Crus Quand Ils

Devraient Réellement L'être. Mme Dubarry, Qui Connaissait Le Roi Comme

Lemonnier, Pensait Comme Lui Sur La Réalité Des Douleurs Dont Le Roi Se

Plaignait Et S'inquiétait, Mais Regardait Comme Un Avantage Pour Elle

Les Soins Qu'elle Pourrait Lui Rendre, Et L'occupation Qu'elle Pourrait

Lui Montrer Avoir De Lui. La Bassesse De M. D'a...[311] La Servit

Parfaitement Dans Cette Circonstance. Ce Plat Gentilhomme De La Chambre,

Au Mépris De Son Devoir, Renonça Au Droit Qu'il Avait D'entrer Chez Le

Roi, D'en Savoir Des Nouvelles Lui-Même, De Le Servir, Pour Empêcher

D'entrer Ceux Qui Avaient Le Même Droit Que Lui, Et Pour Laisser Le

Roi Malade Passer Honteusement La Journée À Un Quart De Lieue De Ses

Enfants, Entre Sa Maîtresse Et Son Valet De Chambre. C'est Là Où

Commence L'histoire Des Plates Et Viles Bassesses De M. D'aumont; Elles

Tiendront Quelque Place Dans Ce Récit. Il Est De Cette Lâche Espèce

D'hommes Qui N'ont Pas Même Le Courage D'être Bas Et Vils Pour Leurs

Intérêts, Et Dont La Platitude Est Toujours Au Service De Celui Qui A

L'apparence De La Faveur.

 

[Note 309: 1774.]

 

[Note 310: Premier Médecin Ordinaire.]

 

Volume 1 Title 1 (Portraits Littéraires, Tome 3) pg 271

[Note 311: Le Duc D'aumont, Premier Gentilhomme De La Chambre, Qui

Était D'_Année_ En 1774.]

 

Cependant Il Était Trois Heures, Et Personne N'avait Encore Pu Pénétrer

Chez Le Roi. On N'en Savait Qu'imparfaitement Des Nouvelles, Et Par

Celles Qui Transpiraient On Jugeait Le Roi Seulement Incommodé D'une

Légère Indisposition. Mme Dubarry En Avait Fait Part À M. D'aiguillon,

Qui Était À Versailles, Et Avait, D'après Ses Conseils, Formé Le Projet

De Faire Rester Le Roi À Trianon Tant Que Durerait Cette Incommodité.

Elle Passait Par Ce Moyen Plus De Temps Seule Auprès De Lui, Et Plus Que

Tout Encore Elle Satisfaisait Son Aversion Contre M. Le Dauphin, Mme La

Dauphine Et Mesdames, En Écartant Le Roi D'eux, Et Rendait Vis-À-Vis De

Lui Leur Conduite Embarrassante. L'incertitude Où Était Lemonnier De La

Suite De Cette Incommodité, L'embarras Dont Était Dans Une Chambre Aussi

Petite Le Service Du Roi, Le Scandale Et L'indécence Dont Ce Séjour

Prolongé Devait Être, Rien Ne Pouvait Déranger Mme Dubarry De Ce Projet

Déraisonnable Et Indécent, Conçu Pour Narguer La Famille Royale. M.

D'aumont S'y Prêtait De Toute Sa Bassesse, Et N'avait Même Mandé À

Personne L'état Du Roi, Pour Faciliter À Cette Femme Le Parti Qu'elle

Voudrait Prendre. La Famille Royale N'en Était Même Pas Instruite Par

Lui, Mais Elle L'était D'ailleurs; Et N'osant Pas Venir, Comme Elle

L'aurait Voulu, Pénétrer Dans Son Intérieur Pour Savoir De Ses

Nouvelles, Elle Se Bornait À Désirer Qu'on Le Déterminât À Revenir À

Versailles. La Martinière[312], Sur La Nouvelle De L'incommodité Du Roi,

Qui S'était Répandue, Avait Accouru À Trianon, Et Y Trouva Le Parti Pris

D'y Faire Rester Le Roi Jusqu'à Sa Parfaite Guérison, Que L'on Jugeait

Devoir Être Dans Deux Ou Trois Jours, Cette Incommodité N'étant Alors

Jugée Qu'une Forte Indigestion. Quelque Désir Qu'eût Lemonnier De Faire

Revenir Le Roi À Versailles, Il N'avait Pas La Force De S'opposer À

La Volonté De Mme Dubarry. Sa Position, Et Plus Encore Son Caractère,

L'engageaient À Tout Ménager, Et, Ne Voulant Rien Mettre Contre Lui, Il

Ne Pouvait Pas Avoir Cette Conduite Franche Et Assurée, Cette Décision

Ferme Et Inébranlable Qu'a L'honnêteté Désintéressée. Le Caractère

Brusque Et Décidé De La Martinière Lui Donnait Cette Force. Ce Vieux

Serviteur Du Roi Avait, Depuis Qu'il Lui Était Attaché, Pris L'habitude

De Lui Parler Avec Une Liberté Qui Tenait De La Familiarité, Et Même

Souvent De L'indécence. Il Ne S'était Jamais Adressé Qu'au Roi Pour Tout

Ce Qu'il Avait Obtenu De Lui, Et Avait Pris Sur Son Esprit Un Ascendant

Qui Le Faisait Réussir Dans Tout Ce Qu'il Lui Demandait, Et Qui Même

L'en Faisait Craindre. Il S'était, Quatre Ans Auparavant, Opposé À

L'arrivée De Mme Dubarry. Il Savait Qu'il Lui Déplaisait Et, Sans S'en

Embarrasser, Il N'agissait Pas Plus Contre Elle Qu'en Sa Faveur. La

Résolution Où Il Trouva Le Roi De Demeurer À Trianon Ne L'empêcha Pas De

Travailler Fortement À L'en Détourner, Et Il Y Réussit Avec Facilité;

Car Le Roi, Qui N'avait Jamais Eu Dans Sa Vie Que La Volonté Des Autres,

N'avait Pas Plus La Sienne Dans Ce Moment. Il Fut Donc Décidé, Malgré Le

Désir Obstiné De Mme Dubarry, Que Le Roi Partirait Pour Versailles Dès

Que Les Carrosses Qu'on Avait Envoyé Chercher Seraient Arrivés. Pour

Donner Une Idée De La Manière Brusque Et Souvent Grossière Dont La

Martinière Parlait Au Roi, Je Rapporterai Que Le Roi, Déterminé À Suivre

Son Avis, Lui Disait, En Lui Parlant De Sa Maladie Et De La Diminution

Journalière De Ses Forces: «_Je Sens Qu'il Faut Enrayer.»---«Sentez

Plutôt_, Lui Répliqua La Martinière, _Qu'il Faut Dételer_.»

 

[Note 312: Premier Chirurgien Du Roi.]

 

M. De Beauvau, M. De Boisgelin, M. Le Prince De Condé, Qui, Par Le

Manège De M. D'aumont Dont J'ai Parlé, N'avaient Pas Encore Pu Voir Le

Volume 1 Title 1 (Portraits Littéraires, Tome 3) pg 272

Roi De La Journée, Le Virent Enfin À Quatre Heures; Et Quoiqu'ils Le

Trouvassent Très-Affaissé, Très-Inquiet Et Très-Plaignant, Ils Jugèrent

Son État Moins Inquiétant Et Moins Douloureux Qu'il Ne Le Disait,

Toujours Par La Connaissance De Sa Pusillanimité. Cependant Les Voitures

Étaient Arrivées, Et Le Roi S'était Laissé Porter Dans Son Carrosse, Se

Plaignant Toujours Beaucoup De Mal De Tête, De Maux De Reins, De Maux

De Coeur. Ses Plaintes Continuelles, Ses Inquiétudes, Sa Profonde

Tristesse, Confirmèrent M. De Beauvau Et Les Autres Dans L'opinion

Qu'ils Avaient De Sa Faiblesse Et De Sa Peur; Et Il N'y Avait Personne À

Trianon Ou À Versailles Qui Imaginât Encore Que L'incommodité Du Roi Pût

Être Le Commencement D'une Maladie. Cependant Tout Paris Fut Averti

Que Le Roi Avait Resté Dans Son Lit Jusqu'à Quatre Heures, Qu'il Était

Revenu En Robe De Chambre Et Au Pas De Trianon, Et Qu'il S'était Couché

En Arrivant. Tous Les Princes, Tous Les Grands Officiers Arrivèrent;

J'arrivai Comme Les Autres, Mais Sans Beaucoup D'empressement, Parce Que

Je Voulais Voir, Avant De Partir De Paris, Une _Personne_ Qui Me Tenait

Plus Au Coeur Que Le Roi Et Toute La Cour, Et Que Par Parenthèse Je Ne

Vis Pas[313]. Je Trouvai À Mon Arrivée Le Roi Couché. Lemonnier, Que Je

Vis, Me Dit Qu'il Espérait, Comme Tout Le Monde, Que

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